Résumé de l’épisode précédent : La pression de la compétition est retombée. Retour au calme au logis des grainetiers ?

LA DER DE DAN

texte : Blanche HERROUGE – photos : Diane AGASSAN

Dixième épisode : Cousu de fil rouge

Le silence régnait dans le gîte. Dès leur retour, les gymnastes avaient regagné leurs lits pour une sieste réparatrice bien méritée. Certains supporteurs les avaient volontiers accompagnées dans cette tentative de méditation poursuivie jusqu’à 19h30. A ce moment, se déroula un curieux manège autour de la chambre Parfum d’Orient où chacun se rendait en grand secret. Sur la porte, il était inscrit « couleurs d’Orient, couleurs du sourire ». Et c’est précisément le sourire bien marqué aux lèvres que tous en ressortaient, prétendant y avoir fait la bise à Dan alors qu’il ne s’y trouvait pas…
Le « parfum d’encens…zen, zen ! » également mentionné avait-il des vertus hallucinogènes ?


A peine une heure plus tard, Dan était bien en chair et en os dans la grande salle, entouré d’un groupe qui s’était encore étoffé. Les fidèles parmi les fidèles Monique, Sylvie, Laura, Mamouda et Poupouda, qui avaient tous assisté à la compétition, n’auraient évidemment pas manqué la réunion annuelle de la confrérie du Bleu de Dan. Elaboré selon une recette tenue farouchement secrète, ce breuvage fit comme toujours l’unanimité, toutes générations confondues. Il était sans pareil pour délier les langues et un sympathique brouhaha s’installa rapidement.

Dehors, la fauvette zinzinula. Le pinson lui répondit en fringotant, ce qui fit glousser la gélinotte. Les filles trouvèrent le moment opportun pour danetter à leur tour. Elles montèrent prestement sur scène pour présenter une véritable superproduction. Qu’on en juge : pour la première fois au monde et à Chemellier, pas moins de dix-sept choristes et trois accords de guitare parfaitement maîtrisés par Laure pour mettre en valeur un texte aux rimes plus que riches, puisque reprenant trente-deux fois « Gaga Gassendiana »…


« Quand on aime, on ne compte pas ! » disait Don Juan. Le public fut de cet avis, qui salua la sincérité de cette performance vocale et musicale par des applaudissements nourris bien avant lui. La chanson retraçant l’histoire d’amour entre un certain Danou et la Gaga fut alors bissée pour le plus grand plaisir de tous.

Peu de temps après, Babeth arriva en compagnie de Marie-Odile. Elle s’était exceptionnellement dispensée du dîner des officiels et avait invité son amie à vivre cette soirée auprès de Dan. Troquant sa casquette de directrice de concours pour celle de présidente de la Gaga, elle n’avait dans sa hâte pas même pris le temps d’ôter son collier d’accréditation. La chorale la gratifia, sans se faire prier, d’une troisième version de son tube de l’été, agrémentée cette fois d’une chorégraphie digne des plus belles soirées de l’Oktoberfest et dont on pouvait soupçonner Cyrielle d’être à l’origine.

 

Les rayons du soleil du soir avaient découpé de leur éventail-laser le plafond nuageux. Devant tant d’insistance, les cumulo-nimbus se saluèrent poliment et prirent congé pour laisser place au spectacle du coucher de l’astre flamboyant. La luminosité et la douceur étaient telles que les juges prirent place à l’extérieur pour se raconter des histoires de juges.


Tandis que le jour se noyait dans les braises de l’horizon, le barbecue dispensait quelques senteurs estivales. Sous le contrôle d’Anthéa, Mélanie avait relayé Claude pour surveiller la cuisson de l’armée de brochettes préparées la veille. Chipolatas et merguez les avaient précédées sur le gril, augurant d’un repas qui comblerait les estomacs.

De retour à l’intérieur et répartis en deux tablées, les convives, une fois rassasiés, improvisèrent un match de volley assis, à l’aide d’un ballon de baudruche. Comme lui, les gages tombèrent, créant bientôt une interminable queue leu leu, chacun voulant offrir une embrassade bien réelle au coach. Un peu pris au dépourvu quand les bises furent venues, les joues rougies et la gorge sèche, Dan se resservit un verre de vin à consommer avec modération.

Sa fille prit la suite de l’animation en main. Bon sang ne saurait mentir, Marie grimpa sur la scène, des dossiers à charge sous le bras. Sous sa conduite, trois équipes allaient maintenant s’affronter en répondant aux questions d’un grand quiz consacré à l’entraîneur bien-aimé. Trente points récompenseraient les bonnes réponses à ses dix-huit questions malicieuses. Aucune zone d’ombre ne subsisterait après cet exercice puisqu’y figureraient tous les thèmes concernant Dan, à part peut-être la date de l’apparition de sa première barbe. Au programme et en une petite heure : Famille, carrière professionnelle, gastronomie, lexicographie, état-civil, lecture quotidienne, géographie…


Dominique, exclue du jeu pour cause de connaissance universelle de cet être cher, buvait du petit lait en observant les visages grimaçant aux énoncés, les têtes grattées jusqu’à l’encéphale et les regards tournés régulièrement vers Babeth qui restait la planche de salut la plus fiable. Dan, également exclu du jeu pour à peu près les même raisons, l’illustra cependant en y insérant quelques images dont celles des bonnes sœurs de la rue Mouffetard ou de ses vêtements d’enfant, distingués d’un fil rouge brodé par sa grand-mère. Chacun s’accorda à penser que ce geste de son aïeule l’avait prédestiné dès son plus jeune âge à connaître une telle longévité au sein de la Gaga.

Il n’était pas encore minuit. L’ambiance était montée de plusieurs degrés, au rythme de la validation des bonnes réponses contrôlées par huissier. Dan semblait heureux comme un pape. Tous les ingrédients d’une soirée réussie étaient rassemblés, quand un coup de théâtre survint. Les lampes de la salle s’éteignirent d’un coup, plongeant ses occupants dans l’obscurité et la perplexité les plus totales…

Chantal avait-elle oublié de régler sa facture EDF ? Notre héros avait-il une lampe-torche sur lui ?
Vous le saurez sans doute dans le onzième épisode de LA DER DE DAN .

A suivre…