Résumé de l’épisode précédent : Les meilleurs souvenirs d’un joueur sont souvent liés à des victoires. Dan ne déroge pas à cette règle.

LA DER DE DAN

texte : Blanche HERROUGE – photos : Diane AGASSAN

Huitième épisode : La Team Gaga

Déjà 3,73 points gagnés par rapport au Régional qui servirait de référence. Ce n’était pas un rêve : l’équipe avait réussi une entame des plus réjouissantes. Cette réalité comptable fit monter chez Dan une incontrôlable bouffée de contentement. Il en déduisit avec soulagement qu’il n’était toujours pas blasé, malgré toutes ces années passées dans les gymnases.

Il était un des derniers entraîneurs en activité dont le visage resterait dans tous les esprits à jamais lié à un club. C’était inéluctable : Le temps des patronages appartenait à l’Histoire et une fidélité comparable à la sienne deviendrait rarissime. Non pas que les nouvelles générations soient plus volages ou moins concernées par la vie associative, mais parce qu’elles suivaient l’évolution de la société. Les études délocalisées, les stages, la mobilité de l’emploi ou tout simplement l’envie de découvrir de nouveaux horizons faisaient parcourir aux plus jeunes de nouveaux chemins de vie. Dan s’estimait comblé de s’être trouvé au bon moment sur un de leurs carrefours.

Dans ce contexte, Paris avait heureusement conservé l’avantage d’être une ville attractive. Depuis quelques années, la Gassendiana avait même le plaisir d’accueillir des gymnastes venues de pays voisins. Ce brassage culturel et cette ouverture aux autres était certainement un des fondements de la parfaite entente qui régnait chez les aînées. Tout comme l’étaient les conditions d’entraînement uniques dans l’Hexagone qui leur étaient réservées : en l’absence de salle dédiée à la gymnastique, il leur fallait installer le gros matériel quotidiennement dans le gymnase partagé avec d’autres sports. Elles avaient su transformer ce handicap en atout, développant conjointement des valeurs de solidarité… et leur musculature !

Dan se prit à détailler le groupe qui, en ce jour particulier, le faisait vibrer une fois de plus. Il en avait conscience, ces filles concouraient pour la première et la dernière fois dans cette composition. Si l’on se référait à leurs origines, on aurait pu croire à une sélection nationale, sept des douze nouvelles régions métropolitaines, plus les Antilles, y étant représentées. C’était bien simple : Tandis que le cent-quatrième Tour de France s’élançait à la même heure, Dan pouvait, en les regardant, parcourir le pays sans donner un coup de pédale.

Des trois dernières recrues, la plus grande voyageuse était Estelle. Globe-trotter installée dans le Grand-Est, elle continuait à développer durablement sa passion pour la gym qui l’alpagua du côté d’Annecy. Sa maîtrise du mouvement d’ensemble, qu’elle avait découvert avec appréhension, était en amélioration continue et elle n’en faisait pas tout un fromage.

L’autre Estelle, formée à Mouvaux, était descendue des Hauts de France pour écrire une des belles histoires de la Gaga. Elle était d’un commerce agréable, un large sourire éclairant son visage lorsqu’elle s’autorisait à sortir une seconde de son intense concentration. Rigueur, organisation et travail en équipe étaient ses maîtres mots.

La jeunesse de Morgane avait suivi les pérégrinations paternelles jusque dans cette même région. Plante sans racines, elle ne s’enlisa pas à Senlis, pourtant proche de la Mer de Sable, mais y pratiqua avec bonheur la gymnastique. A son départ de la ville de Séraphine, elle avait choisi d’être une des fleurs du bouquet rouge et blanc et s’adonnait à l’art du patchwork avant chaque compétition.

Marseillaise sans accent, Laetitia de PACA restait liée au sud-est, y compris asiatique. Mais elle s’était intégrée avec joie dans l’équipe depuis plusieurs années. De l’utilité du flegme sur les agrès, elle était la preuve en salle.

Alice s’en venait de Savenay. Après une parenthèse mexicaine d’un an, cette native des Pays de la Loire avait conservé un appétit de compétition intact.

C’est une blessure qui avait écarté Laure trop longtemps des plateaux. Mais la lyonnaise s’était montrée pugnace. Sa motivation redoublée par ce coup du sort lui avait permis de revenir à son meilleur niveau pour prolonger sa carrière débutée en Auvergne-Rhône-Alpes. L’ancienne alouette de Caluire n’avait pas été plumée…

Lovée pendant son enfance dans un bras de la Seine à Croissy, la francilienne Elise n’avait pas remonté le fleuve très longtemps pour rejoindre la capitale et jeter l’ancre à Port-Gaga. Pendant ses études de médecine, elle avait toujours trouvé un moment pour s’entraîner entre deux micro-siestes. Elle avait d’ailleurs participé à l’intégralité de ces huit éditions successives au plus haut niveau. Avec elle, Marie et Noémie, estampillées 100% Gaga, étaient les seules à avoir vécu la même épopée. L’expérience qu’elles avaient engrangée dans leurs nombreuses compétitions individuelles communes et la bienveillance avec laquelle elles accueillaient les nouvelles arrivantes étaient de nature à tirer tout ce petit monde vers le haut.

La bonne humeur et l’enthousiasme de Vanessa, elle aussi rouge et blanche à vie, faisaient d’elle un élément toujours précieux dans la cohésion du groupe.

Alexia, avait vécu sa première vie gymnique dans les rangs de la Gassendiana, Elle ne les avait quittés que physiquement après son premier Fédéral sous la conduite de Dan. Installée depuis un an en Occitanie, elle avait tenu à boucler la boucle en lui prouvant, par sa présence en ce jour, qu’elle n’oubliait pas tout ce qu’il lui avait apporté.

Calé dans son fauteuil, il les observait toutes avec tendresse tandis qu’elles s’échauffaient au sol. Il pressentait qu’elles occuperaient une place particulière dans sa mémoire, mais ne voulait pas oublier les douze filles qui les avaient accompagnées dans les sept confrontations nationales précédentes, et dont certaines se trouvaient ici : Margot, Amélie, Cynthia, Mélanie, Anthéa, Alix, Pauline, Cyrielle, Juliette, Suzanne, Andréa et Evna lui avaient fait vivre ses moments intenses les plus récents.

Toutes avaient progressé techniquement grâce à ses conseils avisés. Mais la grande fierté du coach était d’avoir toujours su favoriser l’osmose entre ces personnalités si diverses pour les amener à se dépasser ensemble.

Comment cette belle équipe se comportera-t-elle sur les agrès suivants? Notre héros aura-t-il besoin d’allumettes pour garder les yeux ouverts ? Vous le saurez sans doute dans le neuvième épisode de LA DER DE DAN .

A suivre…